Les baleines à fanons et les cachalots figurent parmi les plus grands mammifères du monde. Décimées de 66 à 90 % du temps de leur chasse, les populations se repeuplent depuis quelques décennies. © Annerun974, Wikimedia Commons, cc by sa 3.0

« La population des baleines  bosse du Pacifique a grossi récemment de 60 %, les grandscachalots aussi ont largement réapparu », se réjouit Joe Roman, biologiste à l’université du Vermont, aux États-Unis, et auteur principal d’une étude sur les baleines en tant qu’ingénieur de l’écosystème marin, publiée dans Frontiers in Ecology and the Environment.

Depuis que la chasse à la baleine a été réglementée dans le monde, voire interdite, selon les États, les populations se reconstituent et permettent de mieux comprendre le rôle que ces espècesjouent dans l’équilibre océanique. Selon les auteurs de l’étude, la restauration à long terme des populations de baleine pourrait contribuer à des changements dans la structure et dans le fonctionnement des océans. « Nous avons tendance à penser que les écosystèmes océaniques fonctionnent de bas en haut. Que le phytoplancton, le zooplancton, tous les microorganismes mènent le bal. Certes, ils sont incroyablement importants, mais les gros prédateurs jouent aussi un rôle crucial », souligne Joe Roman.

Vues d’hélicoptère, les baleines ressemblent à des têtards dans une grande mare. Sauf que ce sont des mammifères marins et qu’ils baignent dans les océans. Cela étant, l’influence de ces animaux sur leur écosystème paraît négligeable au vu de leur petitesse dans l’immensité bleue, toute proportion gardée.

Et pourtant, leur cycle de vie impacte bel et bien les mers. Les chercheurs les surnomment « les pompes de l’océan », dans le sens où elles remontent en surface de la matière organique nourricière issue des poissons engloutis dans les profondeurs et rendue accessible au microplancton via leursfèces.

Cette carcasse de 35 tonnes d’une baleine grise déposée par 1.674 mètres de fond dans le bassin de Santa Cruz nourrit une communauté d’animaux : bactéries, palourdes, crabee et autres invertébrés. Eux-mêmes feront office de repas à des prédateurs, comme des calmars ou des poissons, et, possiblement en bout de chaîne alimentaire, d’autres baleines. © Annerun974, Wikimedia Commons, cc by sa 3.0

Carcasse baleine

Cette carcasse de 35 tonnes d’une baleine grise déposée par 1.674 mètres de fond dans le bassin de Santa Cruz nourrit une communauté d’animaux : bactéries, palourdes, crabee et autres invertébrés. Eux-mêmes feront office de repas à des prédateurs, comme des calmars ou des poissons, et, possiblement en bout de chaîne alimentaire, d’autres baleines. © Annerun974, Wikimedia Commons, cc by sa 3.0

Les baleines résistent bien aux oscillations climatiques

Comme les baleines se nourrissent dans certaines eaux, puis migrent dans d’autres pour se reproduire ou mettre bas, la circulation de ces nutriments indispensables aux micro-organismess’avère prendre également une direction horizontale. C’est le « tapis roulant » baleinier, souligne Joe Roman. Et lorsqu’ils meurent, ces cétacés redescendent une ultime fois dans les fonds marins pour servir de festin aux animaux nécrophages qui y vivent. La boucle de la chaîne alimentaireest bouclée.

Les baleines pourraient également faire partie de ces animaux qui atténueraient l’impact duchangement climatique sur les océans, poursuivent les chercheurs. Contrairement aux espèces à courte durée de vie comme le zooplancton, les baleines, les requins ou les gros poissons présentent davantage de résilience aux événements extérieurs, indique Joe Roman. « Parce que ce sont des espèces qui vivent longtemps et n’ont des petits que peu souvent, les oscillations sont atténuées et le système entier est plus stable. » Et le fait de ne plus chasser ces animaux permet désormais de maintenir le carbone de leur carcasse dans les océans et non plus de le relarguer dans l’atmosphère.

Article original : Future Nature