Une étude scientifique vient de montrer que de fortes similarités génétiques existent entre les hommes, les dauphins et d’autres mammifères aux cerveaux particulièrement développés. Ces similitudes pourraient expliquer pourquoi les cétacés, les humains, les grands singes et les éléphants ont de si gros cerveaux et des processus cognitifs aussi complexes.

L’étude publiée dans le dernier numéro de Proceedings of the Royal Society B: Biological Sciences suggère que certaines caractéristiques génétiques ont menée à l’évolution convergente de gros cerveaux chez une poignée d’espèces, parmi lesquelles les humains et les cétacés.

« Cela fait longtemps que nous savons que les dauphins se classent parmi les mammifères les plus intelligents, et qu’ils sont capables d’accomplir beaucoup des choses dont les grands singes sont eux-mêmes capables : reconnaissance dans un miroir, communication, imitation, et transmission culturelle » a expliqué Michael McGowen, l’auteur principal de la recherche, sur la chaîne Discovery Channel, en ajoutant que le cerveau du dauphin était aussi « distinct et différent ».

L'étude génétique a permis d'isoler de fortes similitudes entre dauphins, éléphants et cétacés

McGowen travaille en tant que chercheur auprès du Center for Molecular Medicine and Evolution de l’Université de Détroit. Avec ses collègues Lawrence Grossman et Derek Wildman, ils ont comparé 10 000 gênes producteurs de protéines issus du génome des dauphins avec les gênes comparables de 9 autres espèces : vache, chien, souris, humain, éléphant, opossum, ornithorynque et poule. De ce groupe, ce sont les vaches qui sont historiquement les plus proches des dauphins. Les deux espèce animales ne sont séparées « que » depuis 70 millions d’années.

Des similitudes évidentes sont apparues entre les dauphins, les humains et les éléphants. Ces trois animaux sont connus pour leur gros cerveaux et leur intelligence.

La première chose que les chercheurs ont établie, c’est que ces trois animaux possèdent une horloge moléculaire lente (autrement dit, leur taux de variations génétiques, et donc leur évolution, est plus lent que pour d’autres espèces, par exemple la souris). McGowen explique que cette caractéristique « a été connectée à des mammifères avec des histoires de vie similaires, telles que des espèces avec des générations longues, un investissement parental important, et des populations restreintes. Il se trouve que beaucoup de ces espèces ont également de larges cerveaux, à l’exemple des grands singes, des éléphants et des cétacés. »

Les éléphants sont également réputés pour leur grande intelligence

Les chercheurs ont également découvert que ces animaux très doués avaient connu une évolution adaptative des gènes de leur systèmes nerveux, prouvant ainsi que la qualité, et non seulement la quantité, était importante. En d’autres termes, en ce qui concerne les fonctions cérébrales, la taille n’est pas tout. McGowen affirme que, dans le cerveau, « les plis, le nombre des synapses, le ratio entre matière blanche et matière grise » et d’autres facteurs semblent être des mesures prédictibles de l’intelligence.

Les scientifiques ont également identifié les signatures moléculaires d’une évolution métabolique. D’où cette question sur le mode « qui de la poule ou l’œuf ? » : Qu’est-ce qui s’est produit en premier, l’apparition d’un grand cerveau, ou les changements dans le métabolisme ?

McGowen pense que c’est le second qui a évolué en premier.

« Un gros cerveau a besoin de carburant, on peut donc supposer que les changements du métabolisme ont permis l’évolution du cerveau de grande taille », explique-t-il. « Il est intéressant de constater les mêmes modifications dans les mêmes groupes de gènes chez les lignées présentant de grands cerveaux – primates, cétacés, éléphants. Ceci inclut des gènes touchant au métabolisme et qui vont alimenter le cerveau en carburant, sachant que les tissus nerveux requièrent beaucoup plus d’énergie que les autres cellules. »

On a également découvert chez les dauphins des gènes qui sont liés chez les hommes aux désordres intellectuels et aux troubles du sommeil. Ce fait indique fortement que ces mêmes gènes sont associés à l’intelligence, et « peuvent être impliqués dans les extraordinaires capacités cognitives des dauphins », explique McGowen.

Si l'on prend la taille relative du cerveau comme étalon de mesure, le dauphin est le deuxième animal le plus intelligent de la planète

En ce qui concerne le sommeil, les scientifiques ont découvert qu’un gène particulier partagé par les dauphins et les hommes et lié à l’éveil était altéré chez le dauphin.

« les dauphins ont une forme de sommeil inhabituelle, dans lequel seule une moitié du cerveau est endormie, ce qui leur permet de continuer à nager et rester conscient », dit-il. « C’est excitant d’avoir trouvé un gène qui puisse être mis en relation avec cette caractéristique inhabituelle et distinctive du dauphin. »

Toutes ces découvertes pourraient renforcer l’affirmation selon laquelle les dauphins sont les deuxièmes animaux les plus intelligents au monde.

« Si on utilise la taille relative du cerveau comme un instrument de mesure de l' »intelligence », il faut conclure que les dauphins se classent juste après les hommes modernes en termes d’intelligence » a expliqué à Discovery Channel Lori Marino, maître de conférence en neuroscience et biologie comportementale à l’Université d’Emory.

Ces conclusions pourraient également aider à comprendre pourquoi les pachydermes qui possèdent de gros cerveaux déjouent parfois les manœuvres des humains qui tentent de les étudier. Les éléphants comprennent souvent les tâches très rapidement, ignorent les règles et trichent pour obtenir un maximum de récompenses sous forme de nourriture.

D’après l’article original Dolphins, Humans Share ‘Brainy’ Genes.

Autre sources à consulter :

Like humans, dolphins have brainy genes

Dolphin genome yields evolutionary insights