C’est avec grand honneur que je rédige ce premier article concernant mon travail de réalisatrice. Il est encore assez difficile pour moi d’accepter ce titre : réalisatrice. J’ai toujours admiré de grands artistes qui ont fait de moi, en parti, ce que je suis aujourd’hui. Je suis leur pas tout en tentant de trouver ma propre voie et je n’espérais pas autant d’engouement autour de mon court métrage The Grind. Ce qui me ravit le plus c’est surtout que le message de mon film soit diffusé. La notoriété, la reconnaissance m’importent peu, j’espère juste que ce film soit diffuser un maximum pour éveiller les consciences et tenter humblement d’aider la cause mais ça je reviendrais dessus un peu plus tard.

Tout d’abord permettez-moi de me présenter quelque peu. Je m’appelle Laureine Sautereau, j’ai 25 ans et je viens tout juste de terminer mes études. L’Art a été présent depuis toujours dans ma vie, née d’une mère sculptrice artiste de France et d’un père qui se plongeait dans l’ébénisterie lors de ces temps libres, j’ai baigné dans la culture artistique dés le début. La passion pour les films d’animations est venue rapidement grâce aux films de Disney. Je ne ratais aucune sortie au cinéma à chaque fin d’année avec mon grand-père paternel jusqu’à même être allée voir 6 fois le Roi Lion à sa sortie en 1994. Quand on est gamin on ne se pose pas la question de savoir comment un film d’animation est fabriqué, on regarde son dessin animé et on y croit tout simplement. C’est à partir du moment où j’ai compris que le métier de certaines personnes était de faire ces films qui me donnaient tant d’émotion que j’ai su qu’il n’y avait pas d’autre chemin pour moi ! Je voulais coûte que coûte, moi aussi, donner vie à des personnages, des univers, des mondes, faire ce que je voulais de mon imagination en créant des films. Car dans le cinéma d’animation la seule limite est son imagination. En grandissant j’ai également connu le monde du jeu vidéo, découvrant en plus l’interactivité dans une infinité d’histoires qui devenaient de plus en plus profondes et intéressantes. Bref tous ces coups de coeurs, toutes ces découvertes m’ont fait prendre le crayon très tôt pour tenter de dessiner toutes les histoires que je voulais raconter. Après un BAC L option cinéma audio visuel j’ai continué mon cursus à l’école privée de jeu vidéo, Créajeux, à Nîmes. J’y ai fais un cursus sur 3 ans de cinéma d’animation 3D mais il me manquait toujours de fortes bases en dessin. J’ai donc continué en intégrant l’école Emile Cohl à Lyon et j’ai suivi le cursus de cinéma d’animation 2D jusqu’au diplôme durant 4 ans.

C’est donc lors de la dernière année à l’école Emile Cohl que j’ai réalisé mon court-métrage « The Grind ». Nous devions réalisé chacun un cour métrage d’animation d’environ 3 minutes. En plus de mon amour pour l’animation je suis également une amoureuse de la Nature et des animaux. Il y a énormément de sujet que j’aimerais traiter pour les animaux car si je peux faire passer un message dans mes réalisations autant que ce soit pour ceux qui ne le peuvent pas. J’ai commencé par le Grindadràp car j’ai été profondément choquée par l’indifférence et la violence exercés en famille dans ce massacre. Cette tradition se passe dans la joie et les festivités. Tous les habitants se retrouvent joyeusement autour de ce génocide, car oui disons les choses comme elles sont : décimer toute un clan, composé de plusieurs familles, de femelles gestantes et qu’il n’en reste plus aucun en vie est un génocide. Le côté traditionnel m’a également intéressé : peut-on réellement se permettre de tout et n’importe quoi au nom de la tradition ?

Pour réaliser ce film j’ai longuement étudié toutes les facettes du grindadràp, les raisons des habitants, leur défense et ceux qui luttent contre cette pratique. Je devais prendre position, je devrais diffuser mon message par rapport à ça, je devais présenter mon point de vue entant que réalisatrice. Je pense que stopper cette tradition reste un objectif beaucoup plus accessible dans le court terme que d’autres enjeux plus gros comme le réchauffement climatique ou l’industrie de la viande qui demandent plus de temps pour espérer des changements et améliorations. Pour moi le grindadràp peut rapidement être interdit grâce à l’indignation générale et aux dénonciations. J’ai donc voulu que mon film interroge, éveille et face réagir. Pour cela j’ai voulu appuyé sur ce qui fait mal : l’empathie et surtout la compassion. J’ai donc placé le spectateur à la place des globicéphales pour qu’ils se sentent eux-même attaqués. Le film est structuré en trois partie : la première peut se nommer « le calme avant la tempête ». Elle est douce, nous nageons au sein des dauphins, nous sommes porter par les flots. Ce fut d’ailleurs extrêmement plaisant de dessiner cette première partie. Puis les choses s’accélèrent, on se rend compte que l’ambiance s’alourdit et nous rentrons dans la deuxième phase : le massacre. Je n’ai voulu faire aucune concession, je voulais tout montrer en relatant les faits de la manière la plus exactes possibles. Puis la troisième partie tombe lorsque le dernier dauphin est tué. Le calme revient, c’est presque apaisant mais on se rend compte qu’aucun animal n’a survécu et que la plage, jonchée de cadavre, est tristement coloré d’un rouge vif du sang déversé par les animaux.

L’animation m’a permis d’accentuer cette tragique histoire grâce à la direction artistique que j’ai choisi. Le négatif m’a semblé judicieux pour installer une ambiance malsaine et pesante, seul la couleur rouge du sang est présente et les expressions monstrueuses des humains sont amplifiées par cet effet de gravure. C’était une technique longue et fastidieuse. Voyez-vous pour faire un film d’animation en 2D il faut dessiner chaque dessin. Il y a 25 images par seconde dans un film, ce qui a fait à peu prêt 12 dessins exposés 2 fois par seconde. Au final ce film m’a demandé environ : 1764 dessins.

La durée de production a duré presque 6 mois et j’ai eu l’immense plaisir de collaboré avec le compositeur de toute la bande sonore : Yanier Hechavarria Mayas. Ce fut fabuleux de trouver une personne avec qui il était aussi facile de travailler. Il a tout de suite compris qu’elles étaient mes intentions dans ce film et ce que je voulais et j’ai été ravie dés les premières propositions de ce qu’il me proposait.

Je finirai en disant qu’à travers ce film j’ai voulu personnellement m’exprimer face à ce massacre mais plus globalement face à la facilité avec laquelle l’être humain peut sombrer dans la violence sans honte ni complexe. C’est une violence assumée et normalisée. Les Féringiens ne comprennent pas pourquoi nous nous insurgeons contre leur pratique et leurs enfants attendant chaque année ce massacre avec impatience. Je rajouterai qu’il en est ainsi chez tous les peuples, la corrida, le festival du chien en Chine, les poussins broyés pour faire des nuggets que nos enfants adorent, bref l’Homme arrive avec une grande aisance et ingéniosité à faire preuve d’une cruauté absolue sans en rougir le moins du monde. J’espère qu’un jour nous prendrons conscience qu’un être vivant quelqu’il soit n’est pas la propriété de l’Homme.

Quelques mots du compositeur Yanier Hechayarria Mayas

Collaborer pour ce projet a été pour moi une décision immédiate. J’ai été motivé dès que j’ai découvert les premiers montages de l’animatique.

Le thème me tenait à cœur par son engagement, mais surtout par la passion que la réalisatrice transmettait depuis le début. Le travail a été assez intense grâce à l’énergie et à l’impact qui émanait des séquences du film. À partir du travail sonore, j’ai cherché aussi à causer un choc au spectateur qui l’oblige à être victime et témoin à la fois. À ressentir chaque coup à travers le son, à entendre les cris et la barbarie.

Enfin, cette expérience a été un véritable exemple de collaboration conjointe, non seulement professionnelle, mais aussi personnelle, parce qu’on a partagé les mêmes idéaux, la même passion pour changer les choses à partir d’un geste artistique.